Intolérances alimentaires tests IgG

Différences entre allergies et intolérances alimentaires

Un aliment peut faire réagir une personne pour différentes raisons, dont une allergie alimentaire classique médiée par les IgE (allergie de type I) et une allergie alimentaire retardée médiée par les IgG (allergie de type III). Dans cet article je vais parler plutôt d’intolérance alimentaire plutôt que d’allergie de type III afin d’éviter toute confusion.

Dans une allergie classique de type I, le système immunitaire produit des anticorps spécifiques : les immunoglobulines de la sous-classe E (IgE) face à l’aliment en cause. Ces anticorps entraînent une réaction allergique immédiate. Les symptômes apparaissent en quelques minutes : gonflement soudain et conséquent, difficulté à respirer, éruption cutanée, démangeaisons de la peau et, dans les cas extrêmes, choc anaphylactique. Le diagnostic d’une allergie se fait grâce à des tests cutanés (pricktest) ou sanguins d’IgE après avoir vu un médecin allergologue.  Le traitement de l'allergie consiste en une éviction définitive de l'allergène en cause, même à l'état de traces.

Lors d’une intolérance alimentaire, le système immunitaire produirait d’autres anticorps spécifiques : les immunoglobulines de la sous-classe G (IgG) face à l’aliment en cause (à des protéines de cet aliment pour être plus précise). Les anticorps produisent alors une réponse inflammatoire et les symptômes se manifestent de plusieurs heures à plusieurs jours après l’ingestion de l’aliment. Les symptômes d’une intolérance alimentaire sont, contrairement à l’allergie, extrêmement variés, tout en pouvant ressembler à ceux d’une allergie. Du fait de cette manifestation retardée et variée, il est plus difficile de déterminer l’aliment qui pose problème. Les tests à IgG que l’on va détailler proposent de faire cette détermination mais cela reste controversé. Il est aussi possible de le faire de manière empirique en tenant un journal alimentaire sur plusieurs mois. On comprend déjà que ce « diagnostic » n’est pas aussi évident et tangible que celui des allergies.

L’intolérance au gluten est à mettre de côté. Il s’agit d’une maladie reconnue, partiellement auto-immune, appelée maladie cœliaque. Elle se caractérise par la présence d’anticorps immunoglobuline A (IgA) de type anti-transglutaminase. Son diagnostic repose sur un dosage des IgA complété par une biopsie intestinale. Ces tests sont à faire impérativement lorsque la personne consomme encore du gluten. Il existe des autotests d’une vingtaine d’euros, disponibles sans ordonnance, en pharmacie ou sur Internet. Mais attention, on trouve souvent des tests aux IgG. Il faut choisir celui-ci « AAZ Autotest gluten 2ème génération » qui mesure bien les IgA. En cas de résultat positif, il convient de se rapprocher immédiatement du médecin. En cas d’intolérance au gluten avérée, l’éviction du gluten est définitive, au même titre que les allergies. En revanche, en cas de résultat négatif, avec persistance des symptômes, il convient de se rapprocher également du médecin, et ensuite un test aux IgG pourra éventuellement être conseillé. De plus en plus d’études parlent aujourd’hui d’hypersensibilité au gluten en dehors de la maladie cœliaque.

Pour résumé cette première partie, l’on peut dire que les allergies de type I et la maladie cœliaque ne sont pas contestées, en revanche, les intolérances alimentaires aux IgG restent controversées. En outre, si les premières sont définitives, les secondes seraient réversibles et non définitives. Ces points vont être développés dans les parties suivantes.

Zoom sur le système immunitaire et l'inflammation

Le système immunitaire est le système de défense de l’organisme. 85% du système immunitaire se trouve dans les intestins ! Il existe deux types d’immunité : l’immunité innée à action non spécifique avec laquelle on naît et l’immunité acquise à action spécifique, qui se construit au fur et à mesure de notre rencontre avec le milieu extérieur dont l’alimentation. Ces deux systèmes interagissent ensemble.

Tout corps étranger à l’organisme, vu par celui-ci comme une menace, est appelé antigène. Un antigène déclenche donc une réponse du système immunitaire cherchant à l’éliminer. L’antigène est d’abord filtré par le système inné, et s’il n’est pas éliminé, il doit affronter le système immunitaire acquis.

Une réponse immunitaire efficace implique donc la reconnaissance de l’agent pathogène via les antigènes et l'activation d’anticorps par les globules blancs pour l'éliminer via différents mécanismes.

Quant aux immunoglobulines, ce sont des anticorps produits par les globules blancs. Il en existe cinq classes aux propriétés spécifiques : les IgA, les IgE, les IgG, les IgM et les IgD. Ces anticorps sont donc fabriqués lors d’un contact avec un antigène.

L’IgG est la classe d’anticorps principale qui est produite lorsque l’on rencontre un antigène pour la deuxième fois. Les IgG sont présentes dans la circulation sanguine et dans les tissus. Les IgG protègent contre les bactéries, les virus, les champignons et les substances toxiques. Elles provoquent une réaction immunitaire retardée et prolongée.

Les IgE déclenchent des réactions allergiques et inflammatoires immédiates, notamment par la libération d’histamine.

Il arrive que le système immunitaire soit défaillant : réponse immunitaire de l’organisme insuffisante ou réponse immunitaire excessive, ce qui peut engendrer des allergies, une inflammation chronique et des intolérances, ou encore une réponse immunitaire de l’organisme contre ses propres composants qu’il ne reconnait plus, on parle alors de maladie auto-immune.

Et l’inflammation dans tout ça ?

L’inflammation, qui fait partie de la réponse immunitaire, est un mécanisme de défense indispensable à l’organisme. Elle se déroule en deux phases : initiation de l’inflammation pour permettre à nos cellules de défense (globules blancs) de rejoindre le lieu de l’agression puis la phase de résolution de l’inflammation.

Si cette inflammation est un processus incroyable de protection de l’organisme, elle devient pathologique lorsque la phase d’initiation de la réponse inflammatoire est exagérée et/ou lors d’une résolution insuffisante de l’inflammation.

L'on comprend déjà que les allergies et les intolérances alimentaires favorisent l’inflammation chronique puisque l’organisme déclenche en permanence une réaction immunitaire, et donc une réponse inflammatoire, face à l’aliment en cause si celui-ci est ingéré régulièrement. Et en raison de cette ingestion régulière, le système immunitaire n’en vient pas à bout, et l’organisme se retrouve en inflammation chronique.

Intolérances alimentaires et porosité/perméabilité intestinale

L’on a vu plus haut que près de 85% du système immunitaire se trouve dans l’intestin, lequel est chargé de nous défendre contre les microbes. Normalement l’intestin ne devrait pas réagir contre les aliments car l’organisme dispose d’une tolérance exceptionnelle aux aliments. Mais la clé de cette tolérance est une barrière intestinale intacte.

Or, la paroi intestinale est en permanence agressée par les infections virales, bactériennes ou parasitaires, les médicaments, l’alcool, une alimentation déséquilibrée, les aliments transformés (divers additifs), les pesticides, une digestion incomplète, la dysbiose (déséquilibre de la flore intestinale autrement appelée microbiote : excès de bactéries pathogènes par rapport aux bactéries bénéfiques pour la santé), le stress psychologique et l’exercice physique excessif.

Il en résulte une altération de la paroi intestinale. Je vais expliquer maintenant en quoi c’est problématique pour la digestion et la tolérance :

Les cellules de la muqueuse intestinale sont normalement accolées entre elles par un ensemble de structure appelées « jonctions serrées », cela oblige les aliments digérés à passer via les cellules intestinales appelées « entérocytes ». Le passage via les cellules entérocytes est indispensable car c’est là que les nutriments deviennent des molécules prêtes à pénétrer dans la circulation sanguine pour nourrir nos cellules. Si l’intestin devient poreux, on parle alors de porosité intestinale ou encore d’hyperméabilité intestinale, les nutriments peuvent passer entre les jonctions serrées sans traverser les cellules intestinales. On retrouve donc dans la circulation sanguine des nutriments partiellement digérés, mais aussi des toxines et des agents pathogènes, ce qui va créé une réponse immunitaire pour venir attaquer ces intrus. C’est alors que des protéines d’aliments partiellement digérés, jusqu’à alors bien tolérés, activent le système immunitaire qui ne les reconnait plus.

Donc en gros, l’intolérance survient quand l’organisme n’est plus capable de digérer correctement un aliment et le passage de celui-ci, partiellement digéré, dans la circulation sanguine, entraine une réaction exagérée du système immunitaire et une inflammation digestive voir extra digestive.

L’hypothèse du concept Imupro et des laboratoires pratiquant les tests à IgG est de dire que les anticorps IgG sont créés pour éliminer les protéines d’aliments qui ne sont plus tolérés. Mesurer leur taux pourrait donc permettre d’identifier ces aliments responsables d’une inflammation chronique. Cette hypothèse reste controversée parmi la communauté scientifique et les médecins.

A qui les tests d’intolérances alimentaires aux IgG sont-ils proposés ?

On peut lire sur les sites des différents laboratoires concernés (Zamaria, Barbier, Imupro), que ces tests peuvent être proposés aux personnes qui se plaignent de :

  • Syndrome de l'intestin irritable ou colopathie fonctionnelle (diarrhée ou constipation ou alternance des deux, ballonnements, maux de ventre, gaz, flatulences …)
  • Maladies chroniques inflammatoires de l’intestin (MICI) : maladie de Crohn et rectocolite hémorragique
  • Reflux gastrique, aigreur gastrique
  • Migraine, maux de tête, somnolence
  • Affections ORL chroniques : otite, rhinite, sinusite
  • Asthme
  • Problèmes de peau: urticaire, eczéma, psoriasis, acné, aphtes dans la bouche ...
  • Sècheresse oculaire
  • Douleurs musculaires ou articulaires
  • Maladies auto-immunes
  • Troubles de la thyroïde
  • Surcharge pondérale ou obésité
  • Endométriose
  • Troubles métaboliques (obésité, intolérance au sucre, pré diabète, diabète)
  • Fatigue
  • Trouble du spectre autistique
  • Hyperactivité
  • Anxiété et dépression

Ceux qui proposent les tests indiquent que des travaux scientifiques, pas toujours cités, démontraient  une amélioration sensible voir la disparition des symptômes après éviction de plusieurs semaines à plusieurs mois des aliments positifs en IgG chez une majorité de personnes.

Présentation des résultats des tests

Ces tests peuvent se faire sans prescription médicale et ne sont pas remboursés par l’Assurance maladie. Ils coutent entre 80 et 500 € en fonction du laboratoire et du nombre d’aliments explorés.

Après analyse sanguine effectuée dans votre laboratoire de proximité et envoie des échantillons au laboratoire concerné, celui-ci remet après analyse, un tableau regroupant les aliments testés en indiquant pour chaque s’ils déclenchent un taux d’IgG élevé ou non.

La fourchette de valeur du Laboratoire Barbier, où j’ai envoyé mon test, est la suivante en microgramme par millilitre :

0-9,9 µg/ml : Taux d’IgG spécifiques faible, en vert.

10-19,99 µg/ml : Taux d’IgG spécifiques élevé, en orange.

20+ µg/ml : Taux d’IgG spécifiques très élevé, en rouge.

Pour le laboratoire Barbier, cela s’arrête là. Il n’y a pas d’explications. On en déduit qu’il n’y a pas d’intolérance lorsque les taux d’IgG sont faibles, et une intolérance lorsqu’ils sont élevés, sans trop savoir quoi faire du milieu en orange.

Le concept Imupro va plus loin et propose des recommandations diététiques et nutritionnelles personnalisées et des recettes.

Il est également précisé que les résultats du test ne doivent en aucun cas remplacer les conseils médicaux d’un professionnel de la santé, que les changements d’habitudes alimentaires doivent être mis en place en accord avec un professionnel de la santé ou expert en nutrition, que les tests constituent une base pour un régime d’élimination et de provocation, mais qu’ils ne reflètent en aucun cas l’occurrence ou la gravité de symptômes cliniques.

Enfin, les laboratoires proposant ces tests précisent tous qu’après un certain délai d’éviction, il convient de réintroduire un par un les aliments évités, ce qu’on appelle la provocation, et d’être attentifs aux symptômes éventuels, afin d’identifier ses aliments déclencheurs personnels. Cette phase est même incontournable.

On comprend donc qu’il est indispensable d’être accompagné par un professionnel de santé ou de nutrition !

Des tests largement critiqués par les sociétés savantes et des médecins

Leur coût est l’une des principales critiques, avec celle selon laquelle aucune donnée scientifique ne confirmerait aujourd’hui ces tests. De nombreux médecins reprochent aux tests concernés d’offrir à des patients perdus, parfois désespérés, une solution scientifiquement contestée, facile et chère.

Selon la Société canadienne d’allergie et d’immunologie clinique, « Il n’existe aucune recherche qui appuie l’utilisation de ces tests pour diagnostiquer les réactions indésirables aux aliments ou pour prédire les réactions indésirables futures. » La même position est exprimée par la Société française d’allergologie, l’Académie européenne d’allergie et d’immunologie clinique, l’Académie américaine de l’asthme, d’allergie et d’immunologie, et la Société australienne d’immunologie et d’allergologie.

Après avoir contacté Marcel Bony, le responsable d’Imupro France, j’ai obtenu les liens conduisant à différentes études scientifiques qui font des liens entre l’alimentation, le système digestif et différentes maladies chroniques et troubles du neurodéveloppement : Hashimoto, syndrome du côlon irritable, maladie de Crohn, migraines, asthme, eczéma, hypertension, syndrome métabolique, obésité, rhumatismes, troubles mentaux et trouble du spectre autistique. Si ces études vous intéressent, il suffit de contacter Imupro France. Le contact est facile, les différentes personnes que j’ai eu au téléphone souhaitaient défendre la validité des tests proposés.

Pourtant, le concept Imupro reconnait lui-même sur son site Internet que les corrélations entre la prise alimentaire et l'aggravation des affections chroniques ne sont pas encore scientifiquement prouvées, que la recherche scientifique doit se poursuivre et qu’en outre, ces corrélations sont encore un sujet de débat dans la médecine conventionnelle. On y lit ensuite « Par conséquent, le concept ImuPro appartient à la médecine complémentaire. Si vous voulez suivre cette approche, un avis thérapeutique et un examen médical préliminaire permettant d'exclure d'autres causes de maladie sont des conditions préalables ».

Pour comprendre les principales critiques émises à l’encontre des tests, il suffit de reprendre les propos du Dr Habib Chabane, interviewé par le journaliste scientifique Julien Venesson retranscrits dans son article « Les tests d’intolérances alimentaires IgG sont-ils efficaces ? » ou encore par l’association française des intolérants au gluten (AFDIAG) retranscrits dans l’article « Que penser de l’analyse des IgG anti-aliments ? », que l’on trouve en ligne.

Le Dr Habib Chabane explique que ces tests se réalisent in vitro, c’est-à-dire hors de l’organisme, ce qui ne reflète que partiellement les réactions aux substances analysées. Il critique également le fait que ne sont analysés que des extraits de protéines alimentaires, ce qui ne correspond pas à la réalité de l’aliment lui-même (s’il est cru ou cuit, la variété des fruits et légumes, la nature des protéines extraites…). Ce à quoi Imupro m’a répondu par mail que leurs détracteurs sont cordialement invités dans leurs laboratoires de recherche et de production afin de s’assurer de la qualité de leur méthode.

Le Dr Habib Chabane explique ensuite qu’il existe 4 sous classes de ces immunoglobulines, les IgG1, les IgG2, les IgG3 et les IgG4 qui ont toutes des fonctions biologiques distinctes. Il ajoute que si les IgG1 peuvent bien être responsables d’une réaction immunitaire d’intolérance, les IgG4 jouent un rôle inverse. Cette critique ne tient pas dans le sens où Imupro explique la même chose en précisant bien que les IgG4 sont des antidotes aux IgE impliqués dans les allergies et qu’ils permettraient donc l’acquisition de la tolérance alimentaire, et non de l’intolérance. Marcel Bony assure que les IgG détectées par les tests ImuPro sont à 99 % des IgG 1,2 et 3 et que les IgG 4 ne sont mesurées qu’à la marge.

Pour en revenir aux propos du Dr Habib Chabane, il explique également que « La présence d’IgG dans le sang est un processus normal de l’organisme. Il ne démontre pas un diagnostic d’allergie ou d’intolérance » et que « Le corps fabrique des IgG en grande quantité. L’intestin n’étant pas une paroi totalement hermétique, il laisse parfois passer des petits bouts d’aliments, qui se retrouvent dans le sang. Le système immunitaire va alors fabriquer des IgG contre ces aliments. Elles vont empêcher les allergies alimentaires de se développer. […] Leur présence reflète simplement le contact du système immunitaire avec les aliments. » « Si le test met en évidence une activation d’IgG face à de nombreux aliments (plus de 20 environ) alors il est fort probable que vous ayez une perméabilité intestinale altérée. On retrouve typiquement ce genre de résultats chez les personnes touchées par une maladie inflammatoire chronique intestinale (maladie de Crohn, rectocolite). »

Pour l’AFDIAG, le Dr Habib Chabane a déclaré « Aussi bien à l’état physiologique qu’en cas d’altération de la barrière intestinale, des fragments d’aliments incomplètement digérés, voire des protéines entières, peuvent traverser la barrière et déclencher la production d’IgG anti-aliments. »

Finalement, qu’est ce qui est contesté ? Que le marqueur d’IgG soit un marqueur d’intolérance ou de perméabilité intestinale ? Car à en lire les propos du Dr Habib Chabane, force est de constater qu’ils rejoignent les explications sur le lien entre porosité intestinale et taux d’IgG et donc les explications des tests !

En outre, si les marqueurs d’IgG démontrent seulement le contact avec un aliment, comment expliquer un taux nul concernant des aliments du quotidien et un taux plus élevé concernant des aliments non consommés ?

Une dernière critique des médecins est de dire que ces tests sont dangereux en ce qu’ils pourraient conduire certaines personnes à éliminer de leur alimentation une quantité importante d’aliments. Par conséquent, au lieu de soulager des symptômes, ils pourraient entraîner des carences alimentaires, en plus de rendre très complexe la planification des menus. Dans certains cas, ces tests pourraient aller jusqu’à provoquer de l’anxiété, une peur de s’alimenter et un isolement social. 

Je pense que cette critique est juste, mais doit être mise en balance avec les symptômes ressentis qui ont justement menés la personne à effectuer ces tests. Si la personne vit déjà l’enfer ou voit son quotidien très affecté en raison de différents symptômes inexpliqués et/ou rebelles, trouver un moyen de soulager cela par l’alimentation peut s’avérer précieux. Je le vois tous les jours avec l’endométriose et l’alimentation. L’alimentation anti-inflammatoire, parfois appelée « alimentation anti-endométriose » peut s’avérer frustrante et contraignante, pourtant elle apporte de très bons résultats. Mais oui cela rend les repas de famille plus compliqués, cela demande davantage d’organisation et rajoute de la charge mentale, cela peut même favoriser des troubles du comportement alimentaire… c’est une réalité. Cette réalité ne doit pas être niée. On ne peut pas nier non plus que certaines personnes voient leurs symptômes reculer grâce à l’alimentation, ce qui leur permet de retrouver une vie plus normale. Ce qui n’a pas de prix ! Cette question est donc complexe, et nécessite une approche pluridisciplinaire et doit tenir compte du comportement alimentaire, des émotions, des habitudes, du contexte socio-culturel … Il n'y a pas de recette magique, cela doit être personnalisé !

Ma conclusion

J’espérais pouvoir avoir une vision plus tranchée de ces tests après la rédaction de cet article et il s’avère que ce n’est pas le cas. Je suis en tout cas fermement convaincue que les liens entre alimentation, immunité et maladies existent et que l'explosion des maladies chroniques inflammatoires et/ou auto-immunes est en partie liée à l’altération aussi bien du microbiote que de la paroi intestinale. Je ne peux aussi que constater qu’on est très en retard en France à ce sujet et que de nombreux médecins nient encore ces liens, au détriment de leurs patients.

Je pense aussi qu’on ne peut plus nier les liens entre intolérances alimentaires et maladies chroniques. En revanche, la méthode de diagnostic des intolérances alimentaires reste controversée et je ne saurais trancher.

Je pense quand même que ces tests constituent un outil très intéressant et peuvent donner de bons résultats. C’est aussi ce qui ressort de mon appel à témoignage. Je n’ai reçu qu’un témoignage négatif d’une personne qui n’avait ressenti aucun bienfait sur sa digestion après l’éviction des aliments incriminés. Une dizaine d’autres personnes ont répondu avoir vu un soulagement de leurs maux : fatigue chronique, troubles digestifs, crises d’endométriose, allergies respiratoires et concernant le trouble du spectre autistique, un seuil de tolérance amélioré. 

Je pense aussi qu'il est essentiel d'effectuer ces tests en étant suivi par un professionnel de santé. C’est également la position de Fabien Piasco, diététicien-nutritionniste et de Vanessa Gouyot, dététicienne-micronutrionniste, tous deux spécialisés dans l’endométriose que j’ai interviewés et dont vous retrouverez le témoignage en fin d’article.

De son côté, le Dr Daniel Morin, ancien responsable de la consultation d’allergologie à l’hôpital Paris Saint-Antoine reconnait que le dosage des IgG anti-aliments est un très bon outil quand il est entre de bonnes mains, et que c’est une méthode qui vient en support d’une réflexion clinique, notamment lorsque les bilans habituels de l’allergologue sont négatifs.

Caractère complémentaire de ces tests

En effet, ces tests ne peuvent qu’être complémentaires :

  • De tests biologiques spécifiques et validés scientifiquement :

- Test d’allergies alimentaires par mesure des IgE,

- Test d’intolérance au gluten par mesure des IgA,

- Test respiratoire à hydrogène d’intolérance au lactose, fructose et glucose. Ce test permet également de diagnostiquer un éventuel SIBO (Prolifération bactérienne de l’intestin grêle),

… liste non exhaustive !

  • De la recherche de la cause à l’origine de l’intolérance : L’aliment n’est pas en lui-même responsable des troubles ! Rechercher la cause de la perte de tolérance est indispensable, notamment rechercher la cause de la porosité intestinale.
  • D’un travail sur cette cause et sur la réparation de la fonction intestinale (microbiote et paroi intestinale) si besoin !
  • D’un suivi par un médecin, et en parallèle d’un accompagnement par un expert de la nutrition ou naturopathe.
  • Et d’une écoute de son corps !!! Qui mieux que soi pour savoir ce qui se passe dans son corps !

Cela m’amène à l’avant dernière partie :

Autre outil de détermination d’éventuelles intolérances : la tenue d’un journal alimentaire

L’idée est de tenir un journal ou cahier tout simple, avec trois colonnes au moins. L’une pour votre état psycho-émotionnel du jour, l’autre pour vos symptômes physiques, et la dernière pour votre alimentation. Il est possible d’en ajouter une quatrième pour votre activité physique (sport, marche, yoga, danse, piscine…), une cinquième pour votre cycle menstruel si concernée, et une dernière pour les médicaments et compléments alimentaires.

Normalement après plusieurs semaines, voir mois, vous serez en mesure de déterminer vous-même ce qui vous convient ou non, en gardant bien en tête qu’un aliment peut provoquer des symptômes jusqu’à 3 jours après son ingestion.

Cet outil a l’avantage d’être gratuit ou presque, personnalisé et peut vous aider à vous reconnecter à vous-même et à vous faire confiance. Cet outil vous aidera à prendre du recul avec le flot d’informations contradictoires d’Internet et pourra enfin aider votre médecin ou thérapeute dans son accompagnement.

Il est tout à fait possible de combiner journal alimentaire et test d’intolérances alimentaires.

Mon expérience

J’ai personnellement combiné journal alimentaire pendant plusieurs mois et le test très récemment afin de trouver un nouveau levier de soulagement de mes douleurs neuropathiques post va//in, de mes douleurs ostéoarticulaires, et de l’endométriose.

Je compléterai cette partie après avoir mené jusqu’au bout l’éviction de 8 semaines des aliments auxquels je serais intolérante : œufs et moutarde, et testé leur réintroduction.  Sachant qu’en parallèle j’ai adopté un protocole personnalisé pour prendre soin de mon foie et de mes intestins.

Vous pourriez vous demander pourquoi j’ai écrit cet article avant d’avoir mené l’expérience jusqu’au bout ? Pour deux raisons, tout d’abord, j’ai besoin de comprendre avant de faire quelque chose. Ecrire cet article et interroger des professionnels m’a aidée, me permet de savoir pourquoi j'évite les oeufs, et de rester motivée ! Ensuite, je n’ai pas voulu que cet article soit influencé par ma seule expérience personnelle.

Avant de revenir sur mon expérience d’ici plusieurs semaines, je vais conclure ce article en laissant la parole à deux experts interviewés. Bien que les tests à IgG ne concernent pas spécifiquement l’endométriose, j’ai pris cet exemple, car celui-ci me concerne et concerne la majorité de mes clientes.

Témoignages de deux experts en nutrition interrogés sur les tests en lien avec la maladie de l’endométriose

Interview de Vanessa Gouyot, diététicienne-micronutritionniste, spécialiste de la prise en charge nutritionnelle de l’endométriose, membre du Resendo et expert scientifique nutrition pour EASYENDO

Ce fut un plaisir d’échanger avec Vanessa Gouyot, qui a répondu chaleureusement à mes questions. Avant toute chose, Vanessa Gouyot a rappelé qu’en France, seuls les médecins ont le droit de prescrire des tests et de diagnostiquer des maladies. Toutefois, tout au long de sa pratique, elle a pu être amenée à travailler avec ces tests qui avaient été prescrits par un médecin ou effectués par la patiente elle-même, et elle a aidé à la mise en place du régime conseillé. Elle a constaté de très bons résultats sur des patientes souffrant d’endométriose et de troubles digestifs. Lors de notre échange, elle m’a rappelé que si ces tests peuvent permettre d'aider parfois efficacement la diminution de l'inflammation, ils doivent être correctement interprété et ne pas être pris pour argent comptant en cessant simplement de consommer cet aliment à vie. Les personnes doivent être accompagnées par un professionnel afin de ne pas suivre un régime restrictif et parfois frustrant, toutes seules et à long terme, au détriment de leur santé et de leur confort. Elle ajouté que ces tests pouvaient également être mal compris par le public, dans le sens où les anticorps décelés peuvent rester de 5 à 7 ans dans l’organisme. Ainsi, ces tests ne sont pas en eux-mêmes des outils de diagnostic de la perméabilité intestinale à un moment donné, même s’ils peuvent être un indicateur. En effet, ces tests n’informent pas sur l’évolution de la restauration de la paroi intestinale et il est déconseillé d’en refaire au risque d’avoir le même résultat, bien que les symptômes auraient disparus. Pour elle, les signes cliniques restent les plus importants à prendre en compte.

Si par le passé, elle a pu travailler en première intention avec ces tests, ce n’est plus le cas. Aujourd’hui, lorsqu’elle reçoit en consultation une patiente atteinte d’endométriose, elle évaluera en premier le comportement alimentaire tout en tenant compte de l’alimentation et avant même une éviction. Elle conseille une prise en charge holistique qui tient compte de la tête, du corps dans son ensemble et de l'assiette. Elle vérifiera par exemple si la personne mastique bien les aliments, prends des repas à heure régulière, ne grignote pas, régule son stress, dort bien, bouge quotidiennement… Et si ensuite la patiente se plaint encore de mal digérer ou de douleurs d’endométriose persistantes, elle recherchera la cause et veillera au contenu de l’assiette : alimentation équilibrée, riche en fruits et légumes, en Oméga 3, excès ni de sucre ni d’alcool, consommation raisonnée de viande … Et ce n’est que si les symptômes persistent malgré tout, qu’elle conseillera éventuellement une épargne digestive : limitation du gluten, du lactose et des crudités accusés de ballonnements, ainsi qu’un travail sur la porosité intestinale. Et si enfin, rien de tout cela ne suffit, la question pourra être considérée d’effectuer différents tests dont les tests d’intolérance alimentaire, de concert avec la patiente et le médecin.  Pour en savoir plus, sur son approche, vous trouverez sur son site de formation FormatNutrition, un flyer gratuit « Mieux vivre avec l’endométriose à l’aide de la diététique » qui résume son approche."

Interview de Fabien Piasco, diététicien-nutritionniste, auteur des livres « L’alimentation anti-endométriose » , 6ème édition, et « Endométriose, approche naturelle », 2ème édition :

"L’alimentation est un pilier important dans la gestion des symptômes et du développement de l’endométriose. En effet l’alimentation peut avoir un impact considérable sur certains facteurs de cette pathologie, notamment l’inflammation, le stress oxydatif, l’équilibre hormonal, l’exposition aux perturbateurs endocriniens et l’écosystème intestinal, lequel comprend la barrière intestinale, le microbiote et le système immunitaire.

Je propose une approche basée sur les résultats d ‘études réalisées spécifiquement dans le domaine de l’endométriose. Après avoir écarté une maladie cœliaque, un régime sans gluten peut être essayé. En raison du terrain allergique et inflammatoire des femmes atteintes d’endométriose, et de leur risque très élevé d’avoir de multiples intolérances alimentaires, le retrait des produits laitiers donne, en combinaison avec l’éviction du gluten, des résultats spectaculaires. Bien sûr l’alimentation doit être de qualité, biologique dans la mesure du possible, avec des cuissons douces, riche en fibres, antioxydants et oméga-3 et pauvre en graisses saturés, trans, sucre et aliments transformés. Généralement à ce point les résultats sont pour beaucoup, remarquables.

Mais parfois cela ne suffit pas : les troubles digestifs et l’inflammation pelvienne (ou localisée ailleurs) semble toujours présente. C’est alors qu’il faut faire d’autres investigations. Beaucoup tentent une alimentation pauvre en FODMAPs, mais le protocole n’est quasiment jamais respecté, les résultats ne sont pas toujours là, et la poursuite de ce régime au long cours est questionnable (notamment pour son impact sur le microbiote, la production de butyrate, etc.). A ce stade on peut rechercher d’autres anomalies ou perturbations qui pourraient expliquer l’absence de résultats, comme une histaminose (dosage de la DAO), une dysbiose intestinale (Métabolites Organiques Urinaires), voire un SIBO (test respiratoire). Il faut bien comprendre que les perturbations intestinales sont souvent la conséquence d’un autre dysfonctionnement. C’est là que peut intervenir la recherche des hypersensibilités alimentaires, improprement appelées « intolérances alimentaires », puisqu’il s’agit de réactions immunitaires et non de difficultés digestives.

Les tests d’hypersensibilités alimentaires à IgG (allergies de type III), bien que controversés, peuvent à ce stade, rendre service. En effet j’ai pu voir dans ma pratique plusieurs femmes atteintes d’endométriose être nettement soulagées après avoir exclu des aliments pour lesquels les taux d’immunoglobulines G étaient élevés. Particulièrement les œufs, certaines céréales, même sans gluten, ainsi que des fruits à coques. Bien sûr ces tests sont controversés et onéreux, mais dans certains cas peuvent néanmoins être fort utiles pour soulager des symptômes digestifs et extradigestifs."