Les méthodes d'observation du cycle

Présentation

Marion Vallet, sage-femme et Dr Sophie Saab-Tsnobildadzé, médecin généraliste, définissent les méthodes d’observation du cycle (MOC) comme : « des méthodes scientifiques et fiables de suivi du cycle ovulatoire, fondées sur l’observation quotidienne des biomarqueurs de fertilité de la femme selon un protocole précis (propre à chaque méthode). »

Cela permet aussi bien de déterminer les jours fertiles que ceux infertiles du cycle menstruel. En identifiant les jours fertiles, la personne sait donc qu’elle doit éviter les rapports sexuels avec pénétration non protégés si elle souhaite utiliser la méthode en tant que contraception naturelle ou au contraire que c’est le moment d’avoir des rapports non protégés pour espérer une grossesse.

Cela permet également une meilleure connaissance de soi et de son cycle mais aussi d’évaluer sa santé gynécologique pour l’optimiser.

C’est donc bien plus qu’une question de contraception naturelle ou de fertilité car ces MOC peuvent être utilisées par toutes les personnes menstruées qui veulent comprendre leur cycle, arrêter la pilule, retirer un stérilet hormonal ou en cuivre, soulager leur syndrome prémenstruel (SPM), soulager les symptômes d'endométriose, soulager les symptômes du syndrome de congestion pelvienne aggravés par les variations hormonales du cycle etc. 

Chaque MOC utilise un ou plusieurs biomarqueurs pour déterminer au jour le jour sa fertilité ou non. Je vais les présenter avant d’aborder les trois MOC principales (Méthode de l’ovulation Billings, Modèle Creighton et la symptothermie).

Biomarqueurs utilisés

Chaque MOC utilise donc un ou plusieurs biomarqueurs aussi appelés indicateurs ou indices pour savoir où l’on se situe dans le cycle et si l’on est fertile ou non :

Biomarqueur n°1 : La glaire cervicale 

La glaire cervicale est une sécrétion vaginale physiologique qui est un marqueur d’ovulation réussie, de fertilité et de santé. En effet, cette glaire varie tout au long du cycle. Elle est produite par le col de l’utérus sous l’influence des œstrogènes avant et pendant l’ovulation. Elle devient donc crémeuse et laiteuse à l’approche de l’ovulation puis transparente et visqueuse, comme du blanc d'œuf cru, à l'ovulation. En revanche, après l’ovulation, elle se dessèche sous l’influence de la progestérone. Son rôle est de garder en vie les spermatozoïdes pendant 5 jours environ en attendant l’ovulation car sans elle, les spermatozoïdes ne peuvent pas survivre à cause de l’acidité du vagin.

Biomarqueur n°2 : La température basale du corps

Après l’ovulation, cette même progestérone fait monter la température basale de 0,3 degré environ jusqu’à l’arrivée des règles.

Pour le savoir, il faut prendre sa température corporelle au réveil, allongé.e dans le lit avant de se lever à heure relativement fixe et tous les jours au début (écart maximum d’1h à 1h30 selon les jours) après une nuit d'au moins cinq heures. Vous pouvez choisir une prise buccale, vaginale ou rectale, mais il ne faudra plus changer le mode de prise durant le cycle en cours.

Pour cela, il faut un thermomètre basal (à deux chiffres après la virgule) posé sur la table de nuit. S’il y a des loupés, nuit trop courte ou grasse matinée, il faudra juste en tenir compte dans son calendrier et se dire que la température du jour n’est pas complétement fiable. En outre, une fois que la méthode est maitrisée, il n’y aura plus besoin de prendre sa température tous les jours, et toutes les personnes n’auront pas besoin de la prendre à heure fixe. Vous verrez si votre température varie en fonction de l’heure de prise, ou non.

Biomarqueur n°3 : Le col de l’utérus

En effet, le col de l'utérus se modifie en fonction des périodes fertiles et infertiles. Il sera plus bas, fermé et dur en période d’infertilité et plus ouvert, plus haut, plus doux et plus humide en période de fertilité (pour laisser passer les spermatozoïdes).

Biomarqueur n°4 : Les saignements et les menstruations

En effet, les menstruations peuvent renseigner sur l’équilibre hormonal du cycle en fonction de leur durée, de leur consistance et de leur abondance. Les menstruations ainsi que les autres saignements pendant le cycle peuvent aussi alerter et mettre sur la piste d’un problème gynécologique (ex : syndrome de congestion pelvienne, endométriose, fibrome).

Précisions

Il n’est pas possible d’appliquer les MOC quand on prend des hormones de synthèse (pilule, stérilet hormonal, implant, patch) car, sauf exceptions, celles-ci bloquent l’ovulation pour éviter une grossesse. Les biomarqueurs précités ne seront donc pas observables.

En revanche, la symptothermie, une des MOC, est possible si l'on a un stérilet en cuivre car celui-ci ne bloque pas l’ovulation. En effet le stérilet en cuivre produit de l’inflammation pour éviter une grossesse. A savoir toutefois qu’un stérilet en cuivre peut modifier la glaire cervicale donc il faudra en tenir compte. L'intérêt de la symptothermie sera alors d'apprendre à connaitre son cycle (et non pour tomber enceinte ou comme contraception).

Les MOC sont enfin tout à fait compatibles avec des cycles irréguliers.

La méthode de l’Ovulation Billings®

Cette méthode a été créée par un couple de médecins australiens catholiques. Cette méthode permet de déterminer le moment de l'ovulation et la période fertile du cycle menstruel en observant la seule glaire cervicale.

Cela se fait en se concentrant sur la sensation “à la vulve” tout au long de la journée dans le cadre de ses activités normales, et en l’observant lors de son passage aux toilettes, sur le papier toilette, sans la toucher.

En effet, on a vu que cette glaire varie tout au long du cycle. Elle devient crémeuse et laiteuse à l’approche de l’ovulation puis transparente et visqueuse, en ressemblant parfois à du "blanc d'œuf cru", à l'ovulation, avant de se dessécher après l’ovulation. Au niveau des sensations à la vulve, c’est de plus en plus humide et mouillé à l’approche de l’ovulation, et cela devient glissant et lubrifié à l’ovulation. C’est plus sec le reste du temps.

Cette glaire cervicale ne doit donc pas être confondue avec les pertes vaginales qui n’ont rien à voir.

En fonction des observations, la personne doit remplir un tableau chaque jour.

A savoir que cette méthode a aussi toute une philosophie derrière, très liée à la famille, même si elle est ouverte à tout le monde. Il faut savoir aussi que la méthode proscrit l’utilisation des préservatifs et les autres moyens de contraception (pilule, stérilet en cuivre…). Si la méthode est utilisée à visée contraceptive, les rapports sexuels même protégés sont à éviter pendant la période de fertilité.

Taux de fiabilité théorique : 97% (indice PEARL).

Taux de fiabilité pratique : 77% (indice PEARL) et selon les études 98,5 à 99,5%.

Le modèle Creighton : FertilityCare™ et NaProTechnologie

Le modèle Creighton a été développé en 1977 par le Dr Thomas Hilgers, gynécologue-obstétricien, et ses collègues de l’université Creighton aux Etats-Unis. Ce modèle, tout comme la méthode Billings®, n’observe que la glaire cervicale. Un système de notation standardisé est ajouté pour décrire les observations de la glaire.

Sa grande  particularité est qu’en cas de difficulté à concevoir, il est possible d’avoir accès à la NaProTechnologie, après avoir observé son cycle selon la méthode du FertilityCare™.

La NaProTechnologie, est une médecine de restauration de la fertilité. Il s’agit d’une véritable assistance médicale pour une procréation naturelle. Elle vise à restaurer la fertilité du couple en identifiant et en traitant les causes profondes des troubles de la fertilité, avec un traitement médical éventuel comme la stimulation de l’ovulation et l'apport d’hormones.

C'est différent de la PMA qui recourt à des interventions médicales plus poussées, telles que l’insémination artificielle ou la fécondation in vitro (FIV). Comme l’explique Laurène Sindicic d’Emancipées, dans son article qui lui est dédiée, la NaProtechnologie cherche à rétablir la fertilité de manière plus naturelle, tandis que la PMA contourne les problèmes de fertilité grâce à des techniques médicales avancées.

Il faut absolulement être suivie par un instructrice FertilityCare™ avant d’avoir accès à un.e médecin formé.e à la Naprotechnologie.

Taux de fiabilité théorique du FertilityCare™: 99 % (indice PEARL).

Taux de fiabilité pratique du FertilityCare™ : 95,5% (indice PEARL).

La symptothermie selon différentes méthodes/écoles : Cyclamen®, Sensiplan, Serena, Symptotherm, Eden Fertilité, Serenity Club d'Emancipées ...

La symptothermie repose sur l’observation de deux biomarqueurs : la glaire cervicale et la température basale du corps au réveil depuis le lit sans s’être levée avec un thermomètre à deux décimales (voir supra).

Ces deux outils permettent donc de déterminer les jours de fertilité (apparition de la glaire cervicale d'abord crémeuse et laiteuse puis visqueuse et transparente) et la fin de la période fertile qui est marquée par une élévation d’environ 0,3°C de la température corporelle pendant au moins 3 jours consécutifs, et un asséchement de la glaire cervicale pendant au moins 3 jours également.

Lorsque la température a augmenté et que la glaire s’est asséchée sur minimum trois jours, l’ovulation est donc terminée. Il n’y a plus de possibilité de grossesse jusqu’aux prochaines règles puis réapparition de la glaire sur le prochain cycle.

A savoir qu’une personne peut être fertile pendant ses règles si elle a un cycle court et si la glaire cervicale commence à apparaitre pendant ses menstruations. L’observation du cycle permet donc de repérer cette particularité qui permettra soit d’optimiser ses chances de grossesse soit d’éviter les rapports non protégés à cette période.

A noter que la température reste + élevée de l’ovulation aux prochaines règles. Et ainsi de suite.

Pour la température, l’idée est d’avoir le thermomètre sur la table de nuit. Il est possible de se rendormir juste après le week-end. Cela n’exclut pas qu’il y aura des loupés, soit des nuits trop courtes soit des grasses matinées. Il faudra seulement en tenir compte dans son calendrier et se dire que la température de ce jour ne sera pas 100% fiable. Il en va de même si vous êtes malades ou si vous avez bu de l’alcool etc.

Ces deux signes peuvent être associés à la palpation du col de l’utérus. En effet, le col sera plus bas, fermé et dur en période d’infertilité et plus ouvert, plus haut, plus doux et plus humide en période de fertilité (pour laisser passer les spermatozoïdes). Cet examen n’est pas obligé pour pratiquer la symptothermie.

Taux de fiabilité théorique : 99,6 % (indice PEARL).

Taux de fiabilité pratique : 98 à 99% (indice PEARL méthode Sensiplan). L’OMS estime d’ailleurs que la symptothermie est fiable à 98,2%.

MOC ou contraception hormonale ?

Les MOC sont fondées sur des protocoles scientifiques et sont évaluées par des études.

C’est une alternative fiable au préservatif, au stérilet en cuivre et à la contraception hormonale (pilule, stérilet hormonal, implant, patch) à condition d’avoir été formé.e par des conseillers certifiés selon la méthode choisie.

J’en profite pour faire un rappel fondamental :

Les MOC ne comprennent pas la méthode peu fiable du calendrier Ogino. Ce n’est pas davantage l’utilisation d’applications prédictives (comme Flo et Clue) car celles-ci ne se basent que sur la durée des cycles précédents pour prédire les cycles futurs, ce qui n’est pas possible car chaque cycle peut être différent. Chaque personne est différente et chaque cycle d’une même personne peut être différent.

Donc ici en termes de fiabilité, on ne parle que des trois méthodes précitées.

Les MOC sont même plus fiables  que la pilule. En effet, la pilule a un taux de fiabilité théorique de 99,7% mais en pratique, il baisse à 93% (soit 7 femmes sur 100 qui tombent enceinte sous pilule par an selon l’indice PEARL). Pour rappel, l’indice PEARL de la symptothermie (méthode Sensiplan) est de 98,2% en pratique.

A noter qu’aucune méthode de contraception n’est fiable à 100%. Par exemple, la fiabilité théorique du préservatif est de 98% mais peut chuter à 85% en pratique.

D’ailleurs, si des méthodes barrières (préservatif, diaphragme, cape cervicale) sont utilisées pour avoir des rapports pendant la période, de fertilité l’efficacité de la méthode sera celle de la méthode barrière et non plus celle de la MOV. Autrement dit, vous pouvez avoir des rapports protégés pendant la période fertile, si vous le souhaitez, mais en ayant cette idée en tête.

De plus, les MOC ne présentent ni les effets secondaires ni les risques associés à la pilule.

En revanche, la pilule n’est pas toujours prise qu’à visée contraceptive. Pour ne citer que deux exemples, la pilule peut être prescrite pour soulager les symptômes de l’endométriose ou pour faire régresser un kyste influencé par les hormones.

Dans ce cas, la pilule (qui est un médicament) peut présenter un intérêt et la balance bénéfices/risques doit être discutée avec le médecin prescripteur.

En résumé, c’est ok de prendre la pilule, pour différentes raisons si éclairées, et c’est ok de l’arrêter pour se tourner vers les MOC. Son corps, son choix.

Aucune décision n’est définitive, on peut passer de l’une à l’autre mais il faut du temps pour mettre en place une MOC et apprendre à bien se connaitre.

Conclusion

Cette présentation est très très simplifiée. Elle ne suffit pas à enseigner comment observer son cycle. Il faut absolument se former pour pratiquer en toute sécurité, surtout comme moyen de contraception. 

Pour finir, savez-vous que le cycle menstruel est considéré comme le 5ème signe vital par le Collège Américain des Obstétriciens et Gynécologues après la respiration, la fréquence cardiaque, la température, et la tension artérielle ? Je rappelle qu'un bon équilibre hormonal et une ovulation de qualité sont des signes clés d’une bonne santé générale. S’il y a un déséquilibre, l’idée est de le repérer pour tenter d’y remédier. L’observation du cycle permettra ainsi de repérer s’il y a une infertilité, une éventuelle pathologie gynécologique, un SPM, un manque d’estrogènes, un manque de progestérone pour contrebalancer les estrogènes, une phase lutéale trop courte, une température trop basse pouvant être signe d’hypothyroïdie… A savoir par exemple que la progestérone permet de contrebalancer les estrogènes en deuxième partie de cycle et peut réduire les symptômes du SPM. Elle est aussi anti-inflammatoire. Elle protège également des risques de déminéralisation osseuse et des problèmes cardiovasculaires, tout comme les estrogènes. Cela va donc bien au-delà de la contraception ou de la fertilité. C’est enfin un merveilleux moyen de se réapproprier son corps.

Sources

Marion Vallet, sage-femme, & Dr Sophie Saab-Tsnobiladzé, Cycle féminin au naturel, Leduc Editions, 2022.

Guénaëlle Abéguilé, Troubles hormonaux – Reprenez le pouvoir, Marco Pietteur, 2023.

Méthode Billings France, Napro France et Symptothermie info (sensiplan).

https://focusfertilite.fr/qu-est-ce-qu-une-moc-methode-d-observation-du-cycle/

https://www.emancipees.com/contraception-naturelle/

https://questionsexualite.fr/choisir-sa-contraception/ma-contraception-et-moi/tableau-comparatif-pour-vous-guider-dans-votre-choix-de-contraception