Syndrome de congestion pelvienne

Définition du syndrome de congestion veineuse pelvienne

Selon la définition du manuel MSD, le syndrome de congestion pelvienne est une douleur chronique (depuis plus de six mois) présente dans la région du bassin (pelvis), provoquée par une accumulation de sang dans les veines du pelvis, lesquelles se sont élargies et sont devenues tortueuses.[1]

De son côté, le consensus interdisciplinaire transatlantique VEIN-TERM a définit la congestion veineuse pelvienne comme étant un ensemble : « de symptômes chroniques pouvant inclure des douleurs pelviennes, une lourdeur périnéale, une miction impérieuse et des douleurs post-coïtales (après les rapports), causées par et/ou reflux et/ou obstruction des veines pelviennes, et qui peuvent être associés à des varices vulvaires, périnéales et/ou des membres inférieurs ».[2]

Dans le syndrome de congestion veineuse pelvienne (SCV), on peut retrouver deux choses, d’une part, des varices pelviennes (des veines dilatées) et/ou d’autre part, des veines comprimées. Dans les deux cas, la circulation du sang peut être entravée et l’on retrouve une stagnation et accumulation de sang dans la région du bassin, alors que ce sang devrait remonter au cœur. Il peut également il y avoir un reflux du sang, avec comme conséquence des varices des membres inférieurs.

Zoom sur les symptômes possibles

A titre liminaire, une aggravation des douleurs au fur et à mesure de la journée, en position debout ou assise prolongée, est une caractéristique essentielle du syndrome de congestion pelvienne. Souvent, la position allongée calme la douleur et celle-ci disparait généralement après une nuit de sommeil. Mais, cela n’exclut pas, certains jours, une douleur constante, par exemple à l’ovulation, avant et pendant les règles, en période de canicule...

Ensuite, ces symptômes[3] vont varier d’une femme à l’autre, en fonction des veines touchées. Plus bas, vous découvrirez des schémas de vascularisation du bassin, permettant de faire le lien entre vos symptômes et les veines en cause.

  • Douleurs pelviennes (bas-ventre) chroniques c’est-à-dire depuis plus de six mois,
  • Sensation de pesanteur, de lourdeur, de congestion dans le bas-ventre,
  • Douleurs accentuées en fin de journée, par la position assise ou debout prolongée ou encore par la chaleur,
  • Douleur qui peut être aggravée autour de l’ovulation, la semaine précédant les règles et les premiers jours de règles (en raison de la distension veineuse maximale sous l’influence hormonale),
  • Douleurs pendant ou après les rapports sexuels (dyspareunie),
  • Abdomen gonflé (ventre souvent plat au réveil, mais qui gonfle jusqu’à ressembler à un ventre de femme enceinte au cours de la journée),
  • Ballonnements, troubles digestifs et symptômes pouvant faire penser à un syndrome de l’intestin irritable ou à une colopathie fonctionnelle,
  • Troubles du transit (constipation ou diarrhée), voir sang dans les selles si veines rectales touchées), douleurs au rectum à la défécation, hémorroïdes,
  • Envie pressante et fréquente d’uriner, avec ou sans douleurs urinaires (douleur avant et/ou pendant la miction), symptômes pouvant faire penser à une infection urinaire ou à une cystite interstitielle (inflammation vessie sans infection),
  • Insuffisance veineuse des membres inférieurs (Œdèmes, varices, jambes lourdes, impatiences dans les jambes …)
  • Douleurs lombaires accentuées en fin de journée,
  • Douleurs dans les fesses,
  • Douleurs dans le sacrum et au coccyx,
  • Douleurs autour du vagin et de la vulve (varices vulvaires),
  • Outre la sensation de pesanteur, douleurs de type neuropathique (névralgies): brûlures, picotements, engourdissements, démangeaisons, décharges électriques : sciatique, pudendalgie, clunéalgie, cruralgie, pygalgie/fessalgie, vestibulodynie, vulvodynie[4] … du fait de la compression des nerfs avoisinants,
  • Douleurs articulaires, en effet par leur extension ces varices peuvent s’étendre aux articulations du bassin (ex : articulations sacro-iliaques …) et des hanches,[5]
  • Fatigue physique en fin de journée,
  • Fort impact psychologique: changements d’humeur, anxiété, dépression.

L’intensité des symptômes va d’une gêne discontinue bien tolérée à des douleurs intenses, subintrantes, sources de médicalisation chronique, d’une détérioration de la qualité de vie, de la vie du couple, et d’arrêts de travail répétés. L’échelle de la douleur, selon la méthode de l’échelle visuelle analogique (EVA) est habituellement mesurée entre 6 et 8/10[6], ce qui correspond à une douleur intense à insupportable.[7]

On comprend déjà que les manifestations cliniques du syndrome de congestion pelvienne peuvent être variables et peuvent orienter les investigations vers d’autres organes, avec comme conséquence, un long parcours d’errance médicale et un diagnostic retardé. J’aborde à la fin de cet article la question du diagnostic. Avant ça, je vous propose de mieux comprendre ce syndrome :

 Zoom sur les varices pelviennes

Une varice est donc une dilatation anormale d’une veine. On entend souvent parler des varices des jambes mais, on entend moins parler des varices pelviennes, lesquelles sont des dilatations veineuses des veines du pelvis, autrement dit du petit bassin. L’Hôpital américain de Paris propose la définition suivante : « Les varices pelviennes sont des dilatations veineuses des veines génitales (utérus, ovaires) et/ou développées à partir des veines drainant les autres viscères pelviens ou la paroi pelvienne. »[8]

Normalement le sang qui circule dans les veines retourne au cœur, pour cela les veines sont dotées de valvules qui empêchent le sang de refluer vers les pieds et permettent justement la circulation du sang vers le cœur. Or, l’apparition des varices est souvent due à une défaillance de fermeture de ces valvules. Ces valvules défaillantes n’empêchent plus le reflux, la circulation sanguine s’inverse et stagne dans les veines qui se dilatent et deviennent tortueuses. On observe alors un encombrement, une accumulation et une stagnation anormale de sang (stase) dans la zone qui devient douloureuse et inflammatoire.

En revanche, dans les plexus, zones où les veines se regroupent, il n’existe pas ce système de valve. C’est le cas dans de nombreuses zones du petit bassin et au niveau de la colonne vertébrale. En cas de défaillance veineuse ailleurs, on peut donc retrouver une stase dans ces plexus. 

Infographie du Dr Sénéchal, radiologue interventionnel pour Le Parisien

On ne parle de syndrome de congestion pelvienne que lorsque les varices provoquent un reflux et des douleurs chroniques.

ZOOM sur les veines comprimées

Il peut s’agir par exemple :

  • d’une compression d’une des deux veines cave, lesquelles ont pour fonction de transporter le sang des organes vers le cœur,
  • d’une compression de la veine rénale gauche dans le syndrome de Casse-Noisette (syndrome de Nutcraker) avec dans la moitié des cas, une accumulation de sang dans le bassin du fait de la distension de la veine ovarienne gauche qui se draine dans la veine rénale gauche.[9]
  • d’une compression de la veine iliaque commune gauche entre l’artère iliaque droite et la 5ème vertèbre lombaire juste devant le sacrum. On parle alors du syndrome de May-Thurner, parfois aussi appelé syndrome de Cockett.

Il existe d’autres veines qui peuvent être comprimées, mais très simplement, ici il s’agit de comprendre, que lorsqu’une veine est comprimée, le sang est dévié ailleurs, ce qui crée des embouteillages et une stagnation sanguine dans le bassin à l’origine de douleurs.

L’ostéopathe Rodolphe Bénoit-Levy explique notamment dans son article qu’en cas de compression de la veine cave, le sang emprunte un autre chemin, et se retrouve à vouloir passer via les plexus veineux vertébraux. Or une accumulation et une stagnation de sang à ces endroits peuvent occasionner des douleurs lombaires, sacrées, fessières et neuropathiques (ex sciatiques) invalidantes.[10]

Mieux comprendre la vascularisation du bassin et donc les symptômes

Pour voir les différentes veines du pelvis, et ainsi mieux comprendre les symptômes possibles, je vous invite à lire les informations incroyables réunies par l’Association du syndrome de congestion pelvienne et à regarder les différents schémas proposés. [11] Extraits ci-dessous.

Si vous préférez les vidéos, je vous conseille celle-ci en 3D, qui est géniale pour tout comprendre : Vascularisation des organes pelviens féminins (14 minutes)

Ci-dessous, quelques schémas en exemple : 

https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0755498219301538

https://www.info-congestionpelvienne.fr/en-savoir-plus

 

Diagnostic

Ne sont pas seulement concernées les femmes enceintes et celles ayant déjà eu des enfants. Une femme qui n’a pas jamais eu d’enfants, une femme ménopausée aussi, une femme ayant subi une hystérectomie peut être concernée.

  • Examen clinique

Le diagnostic est évoqué à l’interrogatoire et à l’examen clinique conduisant le médecin traitant ou le gynécologue à vous orienter chez un angiologue ou phlébologue. Des varices visibles sur les jambes associées à des symptômes de congestion pelvienne doivent notamment alerter le professionnel de santé.

Un diagnostic d’endométriose, de fibromes utérins, de syndrome des ovaires polykystiques … occasionnant également des douleurs pelviennes et lombaires, ne doit pas toujours écarter l’intérêt de poursuivre le bilan car certaines femmes peuvent souffrir de l’une de ces pathologies, mais aussi de congestion pelvienne.

Un bilan d’imagerie sera ensuite nécessaire pour confirmer le diagnostic.

Pour avoir des recommandations de professionnels compétents pour le bilan d’imagerie, je vous invite à contacter l’Association du syndrome de congestion pelvienne.

  • Bilan d’imagerie

L’échographie endovaginale est considérée en première intention mais elle doit absolument être réalisée par un radiologue informé de la recherche de varices pelviennes et expérimenté à ce faire.

L’imagerie par résonnance magnétique (IRM) est aussi un examen pertinent, mais là encore le radiologue doit être informé de la recherche de varices et être expérimenté à ce faire. L’IRM sera aussi opportune pour rechercher des lésions d’endométriose, même si là encore le radiologue doit être expérimenté à ce faire.

Ces examens doivent ensuite être complétés par un échodoppler des membres inférieurs puis par un échodoppler abdomino-pelvien. Ces examens permettront de savoir si les varices refluent ou non. En effet, l’écho-doppler est un examen qui vise à observer la circulation du sang dans certains vaisseaux du corps. Il associe l’échographie, qui permet de visualiser les vaisseaux, à une fonction « doppler », qui permet d’observer les conditions d’écoulement du sang dans ces vaisseaux.

Un angioscanner pourra, selon les cas, être prescrit, pour identifier les variantes anatomiques, les occlusions et les compressions veineuses (syndromes de Nutcracker, syndrome de May Thurner / Cockett...).

Si un syndrome de congestion pelvienne est révélé par ces examens, une prise en charge pourra vous être proposée : traitements médicaux pour soulager les symptômes, et si besoin embolisation et pose d’un stent (prothèse vasculaire).

Si la chirurgie est envisagée, avec votre accord, vous serez orientée vers un.e radiologue interventionnel, lequel ou laquelle réalisera une phlébographie. Ce dernier examen n’est réalisé que dans un but pré-chirurgical. Très schématiquement, cela se déroule de la façon suivante : après anesthésie locale, le radiologue introduit un cathéter guide au niveau d’une veine du bras ou de la jambe, jusqu’aux veines à explorer. À l’aide de l’injection d’un produit de contraste iodé, qui donne une certaine coloration aux vaisseaux, le radiologue repère alors les éventuelles anomalies (veines avec reflux, rétrécissements veineux et points de fuite vers les membres inférieurs). Finalement, cet examen est celui qui permet de révéler avec certitude les anomalies veineuse en cause, mais il n'est réalisé que dans un but pré-chirurgical.

Les options thérapeutiques (médicaments pour soulager les symptômes, chirurgie proposée, hygiène de vie et méthodes naturelles), ainsi que les causes et facteurs de risque de ce syndrome feront l’objet de mon prochain article.

Comme mot de la fin, si vous avez des varices pelviennes, pas de panique, elles sont bien souvent asymptomatiques. Si vous en avez pendant une grossesse, pas de panique non plus, elles disparaissent généralement dans les six mois, ou en tout cas ne sont pas douloureuses.

Ici on ne parle que du syndrome de congestion pelvienne, lorsque ces varices deviennent douloureuses et ce, de manière chronique. Si vous avez des questions, n'hésitez pas à me retrouver sur Instagram.

Pour en savoir plus

Association du syndrome de congestion pelvienne

Live organisée par l'Association endométriose et douleurs neuro qui a reçue Anne Naji

Association Nutcracker France

Groupes Facebook : « Congestion pelvienne , varices pelviennes , varices membres inférieurs » et « Syndrome de Nutcracker "Juste entre femmes" »

Sources  

[1] https://www.msdmanuals.com/fr/accueil/probl%C3%A8mes-de-sant%C3%A9-de-la-femme/troubles-menstruels-et-anomalies-du-saignement-vaginal/syndrome-de-congestion-pelvienne

[2] Elkof B, Perrin M, Delis KT, Rutherford RB, Gloviczki P. Updated terminology of chronic venous disorders: The VEIN-TERM transatlantic interdisciplinary consensus document. Journal Of Vascular Surgery 2009;49(2):498-501.

[3] Francine Paisant-Thouveny, Vincent Le Pennec, Romaric Loffroy. Varicocèles, varices pelviennes et syndrome de congestion pelvienne : place de la radiologie interventionnelle. La Presse Médicale, Elsevier Masson, 2019, 48, pp.419 - 434. ff10.1016/j.lpm.2019.03.008ff. ffhal-03484427f

[4] https://www.osteopatheaparis.fr/specialites-2/uro-gynecologie/congestion-veineuse-pelvienne-syndrome-de-congestion-pelvienne/

[5] https://www.elsan.care/sites/default/files/Lettre%20dunk%20Janv%202022.pdf

[6] Champaneria R, Shah L, Moss J, et al. The relationship between pelvic vein incompetence and chronic pelvic pain in women: systematic reviews of diagnosis and treatment effectiveness. Health Technol Assess 2016;20 : 1-108.

[7] HAS/DAQSS/EVOQSS 5, Liste des échelles acceptées pour mesurer la douleur, 12/01/2022

[8] https://www.american-hospital.org/pathologie/les-varices-pelviennes-de-la-femme

[9] https://www.em-consulte.com/article/1098579/le-syndrome-nutcracker%C2%A0-une-cause-rare-de-douleurs

[10] https://www.osteopatheaparis.fr/specialites-2/uro-gynecologie/congestion-veineuse-pelvienne-syndrome-de-congestion-pelvienne/

[11] https://www.info-congestionpelvienne.fr/en-savoir-plus